Les disparus d'Abomé

Sans le moindre bruit, alors que les plaintes humaines se faisaient très proches, Jonas et Zawady bravèrent un ultime lacis d'arbrisseaux, de frondaisons et de branches ployées, et parvinrent aux abords de ce qui semblait être une petite clairière. L'odeur atteignit soudain son summum et le bourdonnement des mouches monta d'un cran. Ils levèrent la tête, et ce qu'ils virent leur congela le sang tant ils se crurent en enfer : des cadavres humains nus comme des vers étaient pendus par les pieds à des branches d'arbres, à la verticale parfaite de vieux fûts corrodés et éventrés dans lesquels venaient s'échouer les fluides corporels découlant de leur putréfaction. Il y en avait une quinzaine : des hommes, des femmes et des enfants, qui un bout de flèche dans le dos, qui les côtes transpercées de plusieurs trous béants. Tandis que le rythme cardiaque des deux agents de l'AIA atteignait sa cadence maximale, de subits craquements les firent pivoter et leur sang se glaça : ils étaient nez-à-nez avec une cinquantaine d'archers ivres de rage, qui les menaçaient de leurs arcs. Des arcs dont les flèches étaient très probablement enduites du plus terrifiant des poisons...