Les enfants du froid

Plaisantant sur les romans d'aventures qui donnent au lecteur des désirs de départs et de cocotiers, Claude Michelet s'interrogeait : «En serait-il ainsi si ce pauvre bougre de Robinson avait échoué sur un quelconque rocher de l'Atlantique Nord cerné par la banquise ?» (dans Des grives aux loups, 1980). Et pourtant les Crusoë du Grand Nord ne manquèrent pas, et l'appel du froid ne s'est jamais démenti. L'exotisme des hautes latitudes et des hautes altitudes existe. Depuis les Inuit que Thomas Edison filmait comme attraction de l'Exposition de Chicago (1901) jusqu'à l'emblématique Nanouk l'Esquimau (Nanouk of the North de Robert Flaherty, 1922), depuis les explorations de Paul-Emile Victor jusqu'aux expéditions médiatisées de Jean-Louis Etienne, la banquise n'a pas cesser d'attirer et d'intriguer, la montagne de fasciner. Ce sont à part entière des lieux de l'altérité radicale. Il convenait d'en visiter l'imaginaire.

De l'Arctique aux terres australes, des promenades alpines du XVIII^e siècle aux relations de voyage dans le Grand Nord au XIX^e siècle, du Spitzberg peint par Louis Tinayre à la Russie de l'orientaliste Ziem, du Canada aux Kerguelen, de la Finlande lapone de Paasilinna à la Terre de Feu, avec des dizaines de voyageurs dans la foulée de Bellot ou George Back, et des dizaines d'écrivains ou poètes sur la trace de Marmier ou Larbaud, avec un hommage spécial au «London français» mort il y a 50 ans : Louis-Frédéric Rouquette. Autant de rêves à décrypter, sur la route des cimes et des pôles...