Bruno Fernandes (1959-) Chercheur indépendant, ancien des Langues'O, une expérience de terrain, comme musicien improvisateur (percussions), au contact de l'underground japonais (free rock, noise, buto, performances) l'incitera à s'engager dans une recherche sur l'histoire des contre-cultures japonaises. A publié les premières monographies en langue occidentale sur le groupe de happening Zero Jigen (2014) et sur Haino Keiji (2016) aux Presses du réel où il dirige la collection Délashiné ! consacrée aux contre- cultures japonaises du XXe siècle. Il a traduit et édité la thèse de Kurihara Nanako sur Hijikata Tatsumi dans la même collection. Il est également intervenant en ENSA et traducteur d'auteurs japonais liés au domaine contre-culturel.
Itoi Kanji (1920-2021), alias Dadakan, demeure, parmi les nombreux artistes iconoclastes qui surgirent de l'underground au Japon durant les années 1960-1970, le plus inclassable, le plus indépendant et le plus jusqu'au-boutiste que cette période féconde de la contre-culture de l'Archipel ait jamais connu. Actionniste de rue, ascète urbain, nudiste politique, pornopoète, anti-artiste, mail artist, marginal dans la marge, marcheur contestataire solitaire et solidaire, Dadakan est ce que Pierre Klossowski aurait sans doute nommé une anomalie négatrice de la monstruosité industrielle intégrale. A fortiori dans un Japon de l'après-guerre, en plein coeur d'une occidentalisation à outrance, où se bousculent des avant-gardes déjà sur la voie d'une canonisation par les instances nationales et internationales de l'art majuscule.
Dadakan fit incontestablement partie des parias de l'art, proche en cela de ses amis du collectif actionniste Zero Jigen.
Dadakan se révélera avec les années le plus résistant - inchangé jusqu'à 100 ans - et le plus pur, refusant jusqu'aux aides financières qui pouvaient lui être proposées malgré la précarité de son existence quotidienne. Négateur radical du capitalisme et de l'économie marchande dont l'art n'est qu'un fétiche de plus, le vieux maître utopiste de Sendai insista tranquillement, prouvant par sa vie même que si un art doit exister, c'est avant tout en tant que refus et contestation permanente du système. Posture radicale qui explique en grande partie l'obscurité médiatique dans laquelle a été maintenu, durant un bon demi-siècle, cet homme remarquable.
Cet ouvrage est la première synthèse dans une langue occidentale sur Dadakan.