Echanges artistiques franco-allemands et renaissance de la peinture abstraite dans les pays germaniques après 1945

Dans Mein Kampf, Hitler n'avait pas fait mystère de son implacable volonté de réduire à néant cette "putréfaction" que constituait à ses yeux l'art moderne. Les nazis menèrent une guerre impitoyable d'assainissement contre la "dégénérescence artistique", épurant les musées, organisant des expositions de démonisation, frappant les artistes d'interdiction professionnelle, les contraignant à l'exil, les internant dans les camps, détruisant et brûlant leurs oeuvres. Ainsi furent annihilées quarante années d'une évolution artistique.

En 1945, face au vide culturel qui est celui de l'ancien Reich en ruines, les jeunes peintres abstraits sont confrontés à un grave dilemme: comment renouer avec la création sans pour autant régresser? À cette question cruciale, Marie-Amélie zu Salm-Salm apporte une réponse pertinente et solidement documentée: c'est à Paris que la nouvelle avant-garde va trouver ses repères.

Dans ce magnifique travail - à l'origine une thèse de doctorat soutenue à la Sorbonne - l'auteur nous livre des archives inexploitées jusqu'à ce jour et les résultats de ses nombreux entretiens avec des artistes et critiques témoins de l'époque. Par-delà sa contribution à la découverte d'un aspect quasi inconnu de la vie culturelle des années cinquante, Marie-Amélie zu Salm-Salm nous montre par sa recherche que, bien avant la sphère politique, ce sont les artistes et intellectuels qui ont anticipé le rapprochement et l'amitié franco-germaniques. De quoi se convaincre, s'il en était encore besoin, que l'art et la culture ne sauraient être réduits à un supplément d'âme.