Ecrits (1982-1991)

Ce livre reprend tous les poèmes d'Evelyne Nourtier écrits avant son entrée au monastère, du moins ceux qui ont été conservés, plus les rares qu'elle écrivit là-bas et quelques pages de son journal.

Extraordinaire aventure spirituelle que celle de ce poète qui prend tous les risques et court haletante, - s'écroule pantelante souvent -, sur les frontières de la folie, de la mort et de la damnation. L'écriture, comme moyen principal de cette aventure, si elle ne peut compter que sur la force, la violence, la sincérité presque insoutenables qui l'emportent, encore doit-elle être douloureusement et héroïquement maîtrisée, élucidée, travaillée, si elle veut valablement rendre compte des réalités auxquelles elle s'affronte. Elle doit être affûtée, sans rien perdre de sa fureur nécessaire.

Lire Evelyne Nourtier, qui s'est désignée elle-même comme une salope, allant jusqu'à signer de ce mot, jusqu'à se signer, dirons-nous, de ce mot, le plus beau synonyme, comme toute sa poésie le crie, de sainte, - lire Evelyne "Salope" Nourtier (et les guillemets ici n'ironisent ni ne relativisent, mais insistent), - lire Evelyne "Salope" Nourtier est une expérience traumatisante. Pas question d'en sortir indemme. Vierge folle, Evelyne s'abandonne devant nous au viol primordial et universel. Elle nous en afflige le spectacle et nous oblige à en ressentir les affres à notre tour. Refermant ce livre, nous savons que nous n'avons été jusqu'ici qu'une mièvre pucelle, un piètre puceau. C'est comme si un pal cosmique avait ouvert une voie en nous. Supplice odieux, supplice terrifiant, supplice délicieux, supplice salutaire.

Adrienne Vérove