Faut-il aller vivre dans les bois ?

Faut-il aller vivre dans les bois ?

Lettre de J.-J. Rousseau à M. Philopolis

Si la pensée matérialiste, au XVIII^e siècle, se caractérise par le refus de toute Providence dans le déroulement de l'histoire humaine, par le refus de tout finalisme sous quelque forme que ce soit, alors la pensée de Rousseau connaît, lorsqu'il écrit le Second Discours et la Lettre à Monsieur Philopolis, ce que nous nommerons un " moment " matérialiste dans le déroulement compliqué de sa réflexion. Une histoire sans commencement réel ni fin assignable, une perfectibilité de l'homme qui exclut toute norme de perfection, tout but à atteindre, et cela dans une nature indifférente qui n'est autre que la figure mouvante du temps : telle est, à ce moment de sa réflexion, l'analyse que propose Rousseau du destin de l'homme et de son espèce. Comme Montaigne dont il s'inspire discrètement mais avec abondance, Rousseau peint le " passage " de l'homme sur Terre. En réalité son abandon. Ce dont, quelques années plus tard, le poète Hölderlin a porté témoignage.