Rayon Culture populaire
Guillaume Tell : résistant et citoyen du monde

Fiche technique

Format : Broché
Nb de pages : 381 pages
Poids : 506 g
Dimensions : 17cm X 24cm
EAN : 9782881825194

Guillaume Tell

résistant et citoyen du monde


Paru le
Broché 381 pages

Quatrième de couverture

Un nom si bref et si vibrant qu'il se fixe dans la mémoire comme la flèche dans la cible. Une apparition - à l'automne du Moyen Âge -, ou plutôt la fixation soudaine d'une image jusque-là errante. Un thème à la fois local et universel, bien plus complexe qu'il n'apparaît au premier regard. Une aventure poursuivie sur un demi-millénaire, portée par les poètes, les artistes, les hôtes de la Suisse, accueillie par les nations, diffusée au-delà des Océans, en dépit des perplexités, des réserves des érudits. Une méditation cent fois reprise sur l'imbrication des thèmes de la violence et de la liberté.

Voilà ce que voudrait montrer ce livre qui propose aux lecteurs bien des itinéraires, européens d'abord mais aussi intercontinentaux, de Turquie en Chine et au Japon, des États-Unis au Paraguay, des Philippines à Cuba. Plaisir d'entendre s'exprimer à propos de Tell des hommes aussi différents que Chateaubriand et Victor Hugo, Ruskin et Petöfi, Tartarin de Tarascon et Mark Twain, Mazzini et Engels, Bakounine et Clemenceau, voire Trotzki, sans parler des champions de la Révolution française et, bien sûr, du poète au rôle déterminant, Friedrich Schiller, mis sur la piste par Goethe. L'apologie est sans cesse confrontée aux propos critiques et les voix du monde n'empêchent pas le débat interhelvétique de se poursuivre d'une génération à l'autre.

«Naissance d'une nation», dira la légende. Et les générations se relaieront pour relater un des rares événements exemplaires à tout jamais. «The best known story in the world», affirme à son propos la publicité d'un film américain en 1924. «Illusion d'optique, grossier anachronisme, manipulation, invention cousue de fil blanc, utilisation indue d'un vagabond venu d'on ne sait où !» s'esclafferont ou s'indigneront ceux qui savent, ceux à qui «on ne la fait pas». Cependant que d'autres, plus modérés dans la forme mais aussi catégoriques sur le fond, suggéreront doucement : «Reconsidérez votre tableau ! N'oubliez pas qu'il s'agit d'un décor de théâtre et que toute cette aventure est essentiellement théâtrale !» Peut-être, mais reconnaissons alors que le tréteau de place de village s'élargit aux dimensions du grand théâtre du monde. Le Tell de Hans Erni, qui a tenu le maquis, dialogue avec la statue de la Liberté de New York.

Car cette histoire toute simple, apparemment simplette, se révélera de siècle en siècle pleine de sens, de force, et porteuse, pour d'innombrables êtres opprimés ou menacés, d'une formidable espérance. C'est qu'elle signifie beaucoup plus qu'elle ne dit, et se charge curieusement des peines, des angoisses, des problèmes particuliers à chaque siècle sinon à chaque nation.

«Connu, trop connu, inconnu, méconnu», Tell, le plus célèbre, le plus encensé et le plus malmené des Suisses, sort brusquement de l'ombre au dernier quart du XVe siècle, pour apparaître tour à tour dans un recueil de documents, un chant, une chronique imprimée, un jeu scénique. Il s'impose à toute une région, à tout un pays et franchit bientôt les frontières confessionnelles, territoriales, linguistiques.

A la fin du XVIIIe siècle, des hommes l'ont cité, discuté, invoqué au-delà même de ce continent, dans l'empire des tsars comme aux jeunes Etats-Unis.

Héros de la liberté, symbole de la résistance à la tyrannie - éprouvé comme Abraham, poussé à tuer comme Brutus - il inspire peintres, poètes, auteurs dramatiques. Son origine incertaine, les précédents troublants d'«ancêtres» nordiques, la distance entre le temps de ses exploits et les premiers témoignages le concernant éveillent - de Voltaire à Gibbon - la méfiance critique. Des historiens tour à tour s'enflamment, se tâtent et se cabrent. Mais la Révolution française d'abord et surtout le poète allemand Friedrich Schiller l'ayant adopté, sa marche à travers les nations ne se laisse pas arrêter. Déjà le Guillaume Tell posthume du fabuliste français Florian (1801) devait connaître des traductions en russe, en allemand, en italien, en anglais (au moins treize éditions aux Etats-Unis), en roumain et en grec.

Capitale, dans la carrière de Telle (à certains égards un fils des planches), la date du 17 mars 1804, où fut créé à Weimar le drame qui porte (à tous les sens du terme) son nom. Ici surtout les traductions se succèdent - comme les représentations -, relayées par les accords de Rossini. Et les séjours en Suisse, tôt pratiqués, de touristes et d'exilés, de faire le reste. Quel florilège de textes, de Goethe à Chateaubriand, de Victor Hugo et de Lamartine à Tartarin de Tarascon et Clemenceau, de Ruskin à Mark Twain, de Keats au Hongrois Petöfi (qui fut Tell dans une vie antérieure !).

Invoqué comme précédent par les anarchistes (Bakounine !), Tell provoque des réserves expresses de la part des marxistes, de Friedrich Engels à Bertolt Brecht. En Suisse même, combien a-t-il inspiré d'artistes (de Füssli à Hodler, de Hans Erni à Luginbühl), de romancier et d'essayistes (de Gotthelf et Keller à Walser) et d'auteurs dramatiques (de René Morax à Fernand Chavannes)... Cependant que Salvador Dali règle par son truchement ses compte avec son père.

Jalonnant l'histoire helvétique, on entend l'appel au héros rassembleur aux heures de grave péril et de fortes commotions ; mais on assiste aussi - et de plus en plus - à sa mise en question, au piquet, voire au rancart, par nombre d'intellectuels, au nom de la probité scientifique comme d'un civisme critique dénonçant un trop long mésusage d'un symbole devenu cliché. Témoin le Guillaume Tell pour les écoles de Max Frisch. Révolte aussi, dès 1968, du fils de Tell (trop longtemps mis en joue) d'un continent à l'autre.

Car Tell, répétons-le, a franchi les mers. L'étude de ses périples n'est pas moins intéressante en Turquie, aux Philippines, au Japon ou en Chine qu'aux Etats-Unis ou au Paraguay. Et voici qu'on perçoit des échos africains...

On l'a dit : un mythe est insubmersible. Condamné, oublié, ou englouti, il refait surface, tel un phoque, là où on ne l'attendait pas. Il peut suffire - comme on l'a vu lors de la chute du Mur de Berlin - de la rencontre d'un Evénement et d'une mise en scène inspirée.

Voilà de quoi - entre autres - traite cet ouvrage, qui n'oublie pas, même au pied du Fuji-Yama, l'impact du paysage alpestre et lacustre des Quatre-Cantons.

A votre disposition pour des illustrations ou pour un contact avec l'auteur (notice biographique au dos et dans le rabat). Avec mes salutations les plus cordiales.

Marlyse Pietri

Biographie

Né en 1925, Alfred Berchtold, après une enfance montmartroise et une adolescence zurichoise, se fixe à Genève en 1944, pour quelques semestres, croit-il, mais en réalité pour la vie. Il s'y vouera à l'enseignement secondaire et universitaire. Ses livres, articles, cours et conférences seront consacrés avant tout à l'histoire intellectuelle et artistique de la Suisse, dans ses relations avec l'Europe. Ses publications de «gai savoir», à commencer par La Suisse romande au cap du XXe siècle et Bâle et l'Europe lui vaudront notamment - sur proposition de Nicolas Bouvier - le Prix quadriennal de littérature de la Ville de Genève.

Avis des lecteurs

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