Histoire du bleu

Dans une lettre adressée à sa femme Clara Westhoff, en octobre 1907, Rilke écrivait à propos d'un pastel de la Vénitienne Rosalba Carrierra : «En regardant ce bleu, j'ai compris que c'était le bleu même du XVIII^e, celui qu'on retrouve partout chez La Tour, chez Péronneau et qui reste encore élégant chez Chardin, bien que là, sur la visière de son étrange couvre-chef (dans l'«Autoportrait aux lunettes d'écaille»), son usage soit plus implacable. On pourrait imaginer que quelqu'un écrivît une histoire du bleu ; depuis le bleu dense, cireux, des peintures pompéiennes, jusqu'à Chardin, jusqu'à Cézanne : quelle biographie !»

L'auteur relève ce défi et propose une carte des bleus, à la fois rigoureuse et subjective, technique et poétique.

Cette biographie du bleu traverse, au cours des siècles, la découverte des gisements de bleus, l'invention du maquillage, les Egytiens assurant leur survie dans l'au-delà, la culture du pastel et le commerce de l'indigo, la légende des gemmes et le manteau de la vierge, les vitraux filtrant la lumière divine, les montagnes lointaines, les rois affirmant leur origine chrétienne, Velasquez suggérant la spatialité, Chardin le coloriste, les impressionnistes brandissant le bleu comme flambeau de la modernité... Enfin Yves Klein, «Yves le monochrome», fera de la poudre bleue sa légende.