L'aridité ne tue personne

L'aridité ne tue personne

La poésie de Mohamed Achaari est en perpétuelle métamorphose, car le poète ne se fie pas au stable prédéfini, quasiment pétrifié, et ne cesse de s'inventer de nouvelles perspectives, tout à la fois poétiques et esthétiques. Son poème ne puise jamais dans la même forme deux fois, comme si l'on appréhendait la redondance ou même la répétition. Comme si Achaari rêvait du « poème parfait » paradoxalement irréalisable mais objet de quête. Ce recueil ne trahit pas cette volonté de créer une nouvelle langue, un lagage autre à même de pousser le figuré jusqu'au paroxysme, voire jusqu'à l'aphasie. L'aridité ne tue personne superpose parole et rythme, contenu et signifiant et surtout pensée et énonciation. La synesthésie privilégie les couleurs et consacre le sens visuel à tel point que le lecteur percevrait des taches et des blancs liés dans un manège chromatique susceptible de nous faire penser à la danse affolée d'un derviche aguerri. De la voix rebelle d'une femme aux arbres anthropomorphisés, en passant par une scène nocturne et un malentendu, Achaari nous invite à découvrir le recueil des sens agrandis dans leurs détails quotidiens jusqu'à leur mythification à caractère universel qui remédie aux maux par l'ultime réflexion sérieuse sur la nature ludique des mots.