L'épistémologie d'Emile Meyerson

L'épistémologie d'Émile Meyerson

En posant l'isonomie du rationalisme scientifique et de l'usage spontané de la raison, en démontrant l'identité d'un même « cheminement de la pensée », commun à toutes les opérations de l'esprit, l'épistémologie d'Émile Meyerson, à laquelle il faut encore rendre justice contre les critiques outrées de Gaston Bachelard, permet de re-questionner, mais tout autrement que ne le fait Bruno Latour par exemple, le lien établi depuis Platon, et relancé depuis Bacon, entre pensée scientifique et conception politique.

Parce que toute science est toujours indissociablement ombre et lumière, on ne peut attendre de la politique qu'elle ne soit que rationnelle, sous peine d'en exclure les multitudes qui, sous ce critère, n'auraient aucune part réelle à la représentation politique endogène.

La question est-elle alors de savoir comment inviter les multitudes au parlement ? Mais cette question en présupposerait une autre : celle de la nécessité absolue de le faire, car rien n'oblige à se représenter le parlement comme espace public par excellence, c'est-à-dire en conformité à un modèle intellectualiste qui ne peut que biaiser la démocratie, subtilement surinterprétée en fonction de l'analogie latente entre espace public et « conseil divin », et ostentatoirenient retraduit, chez les philosophes modernes, en théâtre spécula ire.

Le parcours auquel nous convions le lecteur répond donc au double objectif de contribuer à une intelligence contemporaine de cette épistémologie, et d'en souligner un enjeu politique majeur, et à nos yeux déterminant : celui de l'auto-constitution/auto-intuition d'un « ordre public » endogène en Afrique.