L'Opéra de Charles Garnier

En 1867, après cinq années de travaux, le Nouvel Opéra dévoilait sa façade. En juin 2000, après deux ans de restauration, le même cérémonial se renouvelle : la façade de l'Opéra de Charles Garnier est enfin restituée dans son état originel, telle que Garnier l'a souhaitée. Les ors brillent à nouveau, masques, festons et fonds mosaïqués enchevêtrent leurs reflets dans la polyphonie des marbres : marbres fleur de pêcher, vert de mer et sarrancolin, brocatelle du Jura, brèche de Languedoc, vert de Suède, rouge griotte de Féline, bleu turquin, vert campan, noir de Dinant, porphyre de Finlande et blanc d'Italie... Les statues s'adossent à cette symphonie chromatique : un véritable musée de la sculpture du second XIX siècle. La Danse de Carpeaux, recréée par Paul Belmondo, et Le Drame lyrique de Perraud, mais aussi les œuvres de Cavelier, Gruyère, Maillet, Falguière, Chabaud ornent frontons, loggia et avant-corps, et les Renommées de Gumery à l'angle des façades retrouvent leur éclat. Garnier tel qu'en lui-même, architecte génial et généreux qui possédait cette faculté d'interpénétrer, de fondre en une subtile alchimie l'ensemble des arts ici convoqués pour mettre «la façade en scène», prélude à la féerie du spectacle à venir. L'Opéra de Charles Garnier est certes l'histoire de la restauration du bâtiment et de son décor extérieur, des prouesses techniques et de l'ingéniosité mises en œuvre. C'est aussi l'histoire de sa construction, des interrogations incessantes de l'architecte et de l'accueil du public. C'est enfin une gourmande méditation sur l'art lyrique, véritable liturgie des grands mythes de l'humanité qui, avec Charles Garnier, célèbre son culte dans un théâtre, un palais devenu l'équivalent architectural du spectacle lui-même.