La diplomatie turque au Moyen-Orient à l'ère AKP

La diplomatie turque au Moyen-Orient à l'ère AKP

Quel arbitrage entre idéologie et pragmatisme ?

Héritière de l'Empire ottoman et de la République kémaliste, la Turquie de l'AKP affiche au XXI^e siècle l'ambition de devenir un acteur central dans l'échiquier politique international et en particulier au Moyen-Orient.

En 2002, l'arrivée au pouvoir du parti des « conservateurs-démocrates » dirigé par Recep Tayyip Erdogan est symptomatique de mutations sociales et politiques profondes en Turquie. L'émergence d'une « Turquie noire » et d'une « nouvelle bourgeoisie islamique » modifient l'idéologie politique du pouvoir turc et influence sa diplomatie. C'est en ce sens qu'il faut comprendre l'usage croissant du réfèrent islamo-ottoman, outil significatif de la projection turque dans son environnement régional.

Ce déploiement de la diplomatie turque au Moyen-Orient constitue une redéfinition des relations turques avec l'Europe et l'Alliance atlantique. Affichant une confiance en soi retrouvée, parfois assimilée à un « gaullisme turc », Ankara s'accorde une plus grande marge de manoeuvre pour servir ses intérêts nationaux et tire profit de sa position géographique afin de diversifier ses partenariats économiques et stratégiques.

Pour certains, cette « nouvelle » politique serait basée sur des considérations idéologiques nourries par une nostalgie du passé ottoman et un sentiment d'appartenance à la civilisation islamique. Pour d'autres, la politique d'Ankara serait avant tout motivée par un pragmatisme saisissant, amalgame entre rationalité économique, impératif sécuritaire et quête de puissance.

Cet ouvrage se propose de dépasser ces visions antagonistes et rendre compte de la complexité et pluralité des motivations de la diplomatie turque au Moyen-Orient à l'ère AKP. Les deux approches, idéologique et pragmatique, font l'objet d'un arbitrage constant au gré des circonstances nationales et internationales.