La tête habitable

Le lecteur n'est plus seulement un intrus, il devient aussi un témoin, mais le témoin d'un espace intérieur qui fut habité, qui grâce à lui l'est à nouveau. On devrait ainsi parler non pas d'un « journal intime » mais d'un « journal intérieur » - comme l'a fait, d'ailleurs, François Mauriac - un lieu où l'auteur est passé, où le lecteur peut passer à son tour.

Procéder par extraits souligne encore cette entrée dans un espace où se joue un destin au fil des jours, dans une interrogation dont le lecteur devient le « passant », mais un passant immédiatement plongé dans une « intériorité » dont l'unité n'est pas brisée par ces extraits, ces coups de sonde, mais apparaît mieux, au contraire, dans sa profondeur, plus vaste qu'une logique purement linéaire : nous ne sommes pas ici dans le domaine de l'explication mais dans l'espace de la rencontre, cette pénombre lumineuse que Georges de La Tour a su si bien restituer.