Le géant

Bernard Estardy

Le Géant

Itinéraire d'un génie du son

Quel lien entre « Comment te dire adieu » de Françoise Hardy, « Alexandrie Alexandra » de Claude François ou encore « Le Sud » de Nino Ferrer ? Tous ces titres ou albums mythiques doivent leur succès à un homme : Bernard Estardy.

Homme de démesure à la fois excentrique et sensible, capable des pires folies comme des plus beaux arrangements pour Sardou, Manset et ces « quelques » autres qui ont bâti l'histoire radiophonique de France, Estardy aura été toute sa vie l'ombre visible dans la cabine d'enregistrement de ce studio construit au 95 rue Championnet, en 1966, avec son ami Georges Châtelain. A eux deux, ils fonderont l'un des studios les plus mythiques de Paris, CBE, une petite cabane à magie où viendront s'entasser successivement des artistes nommés Johnny Hallyday, Serge Gainsbourg, Bert Jansch, Gérard Manset, William Sheller, Lee Hazlewood, Claude François, Dalida, puis, plus tard, Carlos, Céline Dion, Bernard Tapie, Bibie, Brigitte Bardot ou encore Didier Barbelivien.

C'est cette grande chanson ininterrompue qu'offre à lire Le Géant. Naïve et touchante biographie à deux voies, à deux-pistes dirait-on, où père et fille discutent ensemble parfois sur plusieurs décennies d'intervalle, parfois via des chansons interposées, cet ouvrage permet pour la première fois de retracer grâce à de nombreux témoignages la vie gargantuesque du « Baron de Méhouilles » comme il aimait s'appeler, de ses débuts dans les caves jazz de la Rive Gauche, jusqu'à son départ en 2006.

À ce jour, la légende parle de plus de 15 000 chansons enregistrées par Estardy, et de plus de 500 millions de disques vendus. « Aujourd'hui, on ne fait plus de chansons, on fait du son. L'industrie a pris le dessus », aimait-il à dire. Une raison de plus pour se replonger dans cette parenthèse (en)chantée construite à l'orgue et au fer à souder par un aventurier des sons. Mais plus que l'aventure d'un homme ou d'un studio, Le Géant raconte surtout soixante ans de musique en France, et cette histoire passe et repasse aussi vite qu'un tube.