Le héros balzacien

Rastignac ou Raphaël de Valentin, Chabert ou Mme de Mortsauf... : qui n'a pas d'abord emporté de sa lecture de Balzac le souvenir de quelques figures ? Peuvent-elles pour autant être assimilées à des héros, alors que le romancier lui-même semble partir du constat d'un héroïsme impossible en ce XIX^e siècle désenchanté et anti-idéaliste ? Cet ouvrage se propose d'interroger la persistance, malgré tout, de formes d'héroïsation dans certains textes balzaciens, et d'exposer le sens donné par le romancier à l'invention de personnages «héroïsés».

Les procédures par lesquelles une figure est mise à part ou rendue exceptionnelle sont d'abord analysées. Notre travail étudie ensuite la manière dont le héros ainsi dessiné se donne et, partant, ce qu'il donne à penser. Quels «héros nouveaux», loin du combattant lumineux de l'épopée antique, invente Balzac ? Quels effets produisent les constructions de personnages héroïsés sur notre mode de représentation et d'intellection du réel ? Fantômes des temps passés ou sujets en marge de la société, ces héros apparaissent comme des points de résistance au mouvement, aux soubre-sauts du XIX^e siècle en marche. Avec eux, le texte balzacien brouille les frontières sociales et les codifications établies et fait voir de nouveaux liens entre les «différents mondes du monde», entre les différentes strates du présent.

L'enjeu est donc de taille : c'est la possible émergence d'un sens en décalage, que dramatise, à travers ses héros, le roman balzacien.