Le pays des passions tristes

La Colombie a vu tant de conflits qui auraient pu être résolus se solder par une guerre faute d'accord entre les parties adverses ; tant de projets qui auraient pu être réalisés perdus au milieu des rivalités entre factions ; tant de bonnes intentions qui ont été gâchées par des affects mal contrôlés. Si l'injustice sociale, le despotisme, l'oligarchie, l'incapacité administrative et la corruption sont à la source de ces drames, la Colombie n'aurait-elle pas pu dépasser ces obstacles sans les emportements de sa classe politique ? L'auteur répond à cette question de la manière suivante : dans toutes les sociétés, il existe une tension interne entre ce que Spinoza appelait, d'une part, les « passions tristes » - la haine, la vengeance, le ressentiment, l'envie, la peur - et, de l'autre, les « passions joyeuses » - la bienveillance, la compassion, le respect et la sympathie. En Colombie, l'équilibre, surtout dans le milieu politique, a lourdement penché du côté de la haine et de la vengeance.

Mauricio Garcia Villegas s'appuie sur la philosophie, l'histoire, la psychologie, les sciences et les arts. En effet, la transversalité de la réflexion n'est-elle pas indispensable pour comprendre les mécanismes de la violence dans un pays aussi complexe, vaste et riche que la Colombie ? L'actualité nous rappelle brutalement que ce n'est pas qu'un problème colombien. Ainsi, en chaussant les lunettes spinoziennes que nous tend l'auteur, c'est quelque chose de bien plus universel que nous découvrons dans les pages du Pays des « passions tristes ».