Le syndrome Picasso

L'ampleur du travail de Picasso, son renouvellement permanent - peinture, sculpture, gravure, dessin, collage, céramique, théâtre, poésie, photo, cinéma, etc. - fascine. Interroge. La diversité créatrice de cet oeuvre semble récapituler, à sa manière, l'essentiel de ce qui l'a précédé. Les événements constitutifs d'une histoire de « l'art » en phase terminale. En ce sens, l'oeuvre d'un Picasso touche-à-tout, en expansion permanente (à l'image de la « mondialisation » née du capitalisme généralisé dans la seconde moitié du XX^e siècle, que certains considèrent encore comme la fin de l'Histoire alors qu'il s'agit sans doute de la fin d'une histoire), semble s'ingénier, consciemment ou non, à achever l'Art, à annoncer sa fin en tant que concept historiquement déterminé (spécifique de la « Modernité ») qui ne saurait échapper aux transformations des sociétés, et plus généralement à l'éphémère de toute chose en ce monde.

Ces 80 ans d'activités créatrices, il est logique - et nécessaire - de les considérer dans le cadre de la longue durée, selon un regard historique libéré de toute prééminence esthétique. Picasso semble alors se situer à l'intersection de deux espaces, l'un conclusif, terminal, l'autre introductif, inaugural, en formation, riche de conceptions et de pratiques nouvelles dont l'art contemporain ne serait qu'un symptôme équivoque. La fin d'un cycle de l'Art et de l'Histoire ?