Le transfert

La menace de licenciements massifs qui plane sur la rédaction de « La Dépêche » incline Julien Levasseur, un vétéran de la rubrique culturelle, à accepter un reportage sur la vie monastique, qui le distraira des soucis de l'heure. Carole Dupin, du Service photo, l'accompagne dans une première expédition au monastère d'Hautefeuille, où le hasard veut que se soit retiré, trente ans plus tôt, un correcteur du journal, Christophe Bachelard, dont personne ne savait ce qu'il était devenu. Féru d'action révolutionnaire, il partageait à l'époque avec son ami Julien la même révolte contre l'iniquité. Un besoin d'action qui, pour l'un, s'est émoussé dans les routines professionnelles, quand il s'est traduit, pour l'autre, par un engagement sans retour.

Attiré, autrefois, par la voie mystique, Julien, mal délivré de ce qu'il nomme sa « vaine obsession du divin », s'accommode aujourd'hui d'une incrédulité maussade. Christophe, lui, persiste dans une quête censée le rapprocher du centre de son être, sous l'effet d'un assentiment inconditionnel à tout ce qui existe. Sa révolte initiale ne s'est pas éteinte, elle a seulement changé de signe : la vie monastique lui apparaît comme la contestation la plus radicale qui soit d'un monde mû par la volonté de puissance et le mépris des faibles.