Le triomphe de la mort

«Dans les discours sur la mort qui se multipilent depuis quelques années, revient souvent le nom d'Hélinand de Froidmont, auteur des célèbres Vers de la Mort qui, lus et relus, ont été imités pendant tout le moyen âge. Cet ancien trouvère, devenu, vers la fin du XII^e siècle, moine cistercien, fut le premier poète à faire de la Mort un personnage vivant et l'acteur principal de son œuvre. Par certains côtés, les Vers de la Mort annoncent les fameuses danses macabres du XV^e siècle.

L'originalité de la présente «remise en voix» réside dans la mise à la scène. Assurément, elle fait ressortir la portée satirique de l'œuvre et beaucoup de critiques, à juste titre, ont été sensibles à ce cri d'alarme contre les égoïsmes et les turpitudes humaines.

Le joyeux trouvère avait un jour compris où était la vérité. Aussi, au fond de son couvent, veut-il entraîner ses amis dans une marche allègre à venir le rejoindre à dire, comme lui, adieu aux plaisirs d'ici-bas : «Adieu lècherie ! Adieu luxure !»

Tel est le sens de cette moralité joyeuse qui fait entendre en ce Triomphe de la Mort comme un écho de la vraie vie. La mise en scène d'Emile Lanc a non seulement le mérite de souligner la portée satirique de l'œuvre, mais elle a surtout l'art de rendre sensible le sens profond du message. On voir combien la théâtralisation permet de restituer une authenticité voilée par notre pratique de la lecture silencieuse.»

Monique Santucci

Il fallait, pour illustrer l'aspect satirique de ces Vers de la Mort, un grand artiste qui sache évoquer la mort et dont l'humour en transcende l'horreur. C'est l'un des plus célèbres peintres de notre temps, Antonio Saura, qui a pris joie à créer cinq dessins originaux pour ce Triomphe de la Mort