Les croisés en Orient

L'ensemble Antioche-Chétifs-Jérusalem, composé sans doute, dans la forme que l'on connaît, à la fin du XII^e siècle, constitue le noyau du cycle de la croisade, que de multiples branches enrichiront par la suite. Ces trois poèmes, dont le substrat historique est essentiellement la première croisade, rapportent les hauts faits de l'ost Deu (Antioche, Jérusalem) ainsi que les exploits de quelques chevaliers tombés aux mains des Turcs au cours de l'expédition (Les Chétifs). Ainsi, pour la première fois dans l'épopée romane, l'action dans sa quasi-totalité se déroule en terre orientale, dans un espace aux multiples résonances : c'est avant tout la Terre sainte, espace de pèlerinage et source de la spiritualité chrétienne ; c'est aussi une terre estrange, occupée par des « païens » et que les Francs ont pour mission de conquérir ; c'est encore le seuil de ces contrées lointaines et légendaires dont les images, comme le montre le succès du Roman d'Alexandre, nourrissent à cette époque les rêves de l'Occident, suscitant autant d'émerveillement que de suspicion. En suivant les croisés en Orient, le poète compose une oeuvre originale et, tout en marquant sa volonté de se référer à une tradition où brillent les grandes figures de Roland ou des héros du cycle de Guillaume d'Orange, il donne à la chanson de geste l'occasion de se renouveler.