Les grandes oreilles du président

«Un régime autoritaire et personnel est contraint d'organiser autour de son chef un filet protecteur aux mailles serrées [...]. Si puissante est la liberté que pour la contenir, quand elle se sent mal à l'aise, il faut, d'avance, la priver d'air.»

Qui aurait cru que le François Mitterrand qui dénonça férocement les écoutes téléphoniques abusives en 1968 serait, quelques années plus tard, à l'origine d'un des procès les plus retentissants de ce début de siècle?

Créée par François Mitterrand un an après son élection à la présidence de la République, la «cellule élyséenne» dirigée par Christian Prouteau et Paul Barril a pour mission initiale de coordonner la lutte antiterroriste.

Cette cellule n'a de comptes à rendre qu'au président lui-même, au mépris de l'organisation hiérarchique de l'Etat. Très vite, la situation dérape: plus de deux mille personnes - hommes politiques, journalistes, éditeurs, écrivains, barbouzes et comédiens - sont écoutées. On s'éloigne de plus en plus des impératifs de la sécurité de l'Etat et des Français pour verser dans l'espionnite.

Au terme d'une étude minutieuse, Yves Bonnet et Pascal Krop nous livrent une version inédite et solidement étayée de l'une des pages les plus noires et les plus mystérieuses des «années Mitterrand».