Les volontaires de la mort

«Je n'ai certes pas voulu écrire un livre sur les Palestiniens. Pas plus que sur le terrorisme en général et les hommes du 11 septembre. La réalité a rattrapé ce travail. Impossible en effet d'échapper à sa prise en dépit d'un souci permanent de distanciation. Depuis août 2000, j'ai écrit au fil de la mort obstinément répétitive, en expansion dans le monde entier.»

François Géré

Suscitant l'incompréhension horrifiée des opinions occidentales, les attentats-suicide se multiplient et marquent étrangement le début de ce second millénaire. Le sacrifice meurtrier est indéniablement un phénomène mimétique. Comment comprendre la motivation de celui qui fait de lui-même une arme? Même si chaque acte de mort est fondamentalement unique, que nous disent les zélotes de l'Antiquité, les cathares, les kamikazes japonais, les nihilistes russes, qui puisse nous éclairer sur l'épidémie suicidaire actuelle? Qui sont ces volontaires de la mort? Sont-ils, comme on les dépeint souvent, de jeunes égarés, drogués de surcroît? Pour avoir une chance de contrer cette menace, il est nécessaire de révéler, sans complaisance, les raisons psychologiques, sociales et culturelles qui poussent hommes et femmes aux confins de l'absurde.

Seule une telle réflexion permet de fonder une riposte intégrale. Car dans l'urgence de l'agression, les «autorités» se doivent de réagir par tous les moyens de la force, militaire et policière; mais sur le long terme, ce sont les racines de ce mal tragique qu'il faut supprimer. Pour défaire le sacrifice meurtrier, les démocraties occidentales doivent se soumettre à un sérieux examen de conscience et déclarer le prix qu'elles donnent à la vie humaine aujourd'hui. Quelles valeurs ont-elles à offrir qu'elles ne déprécient en les transgressant?