Louis Ganne et le sang des Arvernes

Louis Ganne et le sang des Arvernes

Vingt siècles sépareront les guerriers de l'Arverne gauloise déferlant furieusement de leurs monts sur le Romain, de la création de la Marche Lorraine, par le petit père Ganne, comme on surnomme affectueusement l'homme si peu militaire d'aspect ou de disposition. C'est pourtant de ce lointain héritage - que nous révèle son nom, qui signifiait chef en gaulois de la région - qu'il faut retrouver la source de ce puissant hymne guerrier qui, depuis, traverse les frontières, porteur d'espoir aux mauvais moments, en dira Joffre qui s'y connaissait. Précédée d'un Père la Victoire qui, déjà, a rendu le sourire aux têtes parisiennes lasses de souvenirs de défaites, la Marche Lorraine place au patrimoine de son pays l'ancien petit orphelin de l'habile ménétrier de nos campagnes qui faisait danser son monde aux sons de sa vielle et sa cabrette, jeune chef mineur victime trop tôt d'un éboulement de mine pour avoir pu deviner poindre en son petit enfant le futur chef dirigeant les bals de l'Opéra de la grande capitale.

Et français Ganne le sera. Créateur de l'Orchestre Ganne de Monte-Carlo, il consacrera infatigablement sa baguette de chef d'un bout à l'autre de l'Europe à la diffusion et la connaissance de la musique française. Quant à ses partitions, du plus simple air populaire aux grandes pages de l'homme de théâtre, témoins ses indestructibles Saltimbanques chers à ce jour au coeur de ses concitoyens, elles se distinguent par la maîtrise de l'écriture et ce souci de l'élégance qualifiée régulièrement de « si française » par nombre de plumes étrangères averties.

Né rieur, remuant au possible, son coeur « d'une excessive bonté », a-t-on dit, ne se verra guère épargner les souffrances de la vie. Il saura néanmoins demeurer aux yeux des autres « l'homme qui a le courage d'être gai ».