M'sieur

Frigyes Karinthy (1887-1938), poète, humoriste, romancier, auteur dramatique, traducteur. Ecrivain précoce, il publie son premier roman à 15 ans dans le pur style de Jules Verne (Voyage de noces au centre de la terre). A partir de 1906, il fait paraître régulièrement des chroniques, des critiques, des nouvelles, des poèmes. Après un bref passage à l'université où il étudie d'abord les mathématiques et la physique, puis fait un peu de médecine, il choisit la carrière de journaliste en s'installant à une table du célèbre café New York de Budapest. Il doit sa popularité à une série de caricatures littéraires (C'est ainsi que vous écrivez..., 1912) dans lesquelles il pastiche les célébrités de l'époque, hongroises ou étrangères. Cette œuvre aura plusieurs éditions revues et augmentées. Ecrivain très fécond, il publie un grand nombre de nouvelles, de sketchs, de poèmes, de croquis. Son genre préféré est le récit de voyage fantastique dans la lignée de Verne et Swift (Faremido, 1916, Capillaria ou le pays des femmes, 1921). Preuve de sa notoriété, on commence à éditer ses œuvres complètes en dix volumes en 1928 (il a 41 ans). Sa dernière grande oeuvre, est également un Voyage ; atteint en 1936 d'une tumeur au cerveau, il est opéré à Stockholm par le meilleur spécialiste de l'époque, grâce a une souscription nationale. Dans un récit intitulé Voyage autour de mon crâne (1937), il décrit sa maladie et son opération avec un sens de l'abservation hallucinant. Le 29 août 1938 il meurt comme le héros de l'une de ses nouvelles fantastiques : en laçant sa chaussure.

A côté des caricatures littéraires, M'sieur (en hongrois, Tanár úr kérem, 1912) est son oeuvre la plus populaire. Malheurs et joies de collégiens ou le paradis perdu de l'adolescence. Il s'agit d'un chef-d'œuvre dans son genre, reconnu comme tel depuis toujours en Hongrie et qui, depuis plus de 80 ans, procure des moments d'intense plaisir aux générations successives, œuvre qu'on lit et relit plusieurs fois dans sa vie, véritable livre de chevet qui abandonne sans difficulté la compagnie des jouets de la chambre d'enfant pour s'installer sur les rayons des bibliothèques les plus sérieuses, en y apportant bien sûr cette graine d'humeur et d'irrévérence sans laquelle rien de véritablement sérieux ne peut se concevoir.

Lajos Nyéki