Mère Marie, 1891-1945

La vie d'une enfant gâtée devenue un être de feu : telle fut l'existence de Marie Skobtsov.

Née Elisabeth Pilenko sous Alexandre III dans une Russie prospère, elle eut tous les dons : poète, peintre, brodeuse... Jeune fille, elle rejoint une brillante intelligentsia, publie de la poésie et s'éprend de l'écrivain Alexandre Blok. En même temps, tout en militant auprès des socialistes révolutionnaires, elle obtient d'étudier la théologie à l'Académie de Saint-Pétersbourg.

L'échec d'un premier mariage la ramène dans sa propriété du Kouban, où elle est la première femme élue maire par le nouveau pouvoir, en février 1918. Elle a vingt-sept ans. Ce qui ne l'empêche pas, arrêtée par les Blancs, de faire la conquête de l'officier qui la juge et de le suivre à Paris, dans la dérive chaotique des émigrés devenus "apatrides".

Mais la vie de cette personnalité paradoxale ne connaît décidément pas la ligne droite. Bouleversée par la mort d'un de ses enfants, elle décide de rompre avec son ancienne vie et se fait moniale. La Seconde Guerre mondiale éclate. L'Occupation fait des ravages. Mère Marie réunit un groupe d'orthodoxes qui se vouent aux plus démunis et sauvent des Juifs au péril de leur vie. Elle-même est déportée à Ravensbrück, où elle meurt.

Au bout du roman tragique que fut sa vie de contradictions, Mère Marie reste cette religieuse extraordinaire dont parle Geneviève de Gaulle Anthonioz dans ses souvenirs de Ravensbrück.