Mexico city blues

«Il y a des années Allen Ginsberg, dans une lettre qu'il m'avait envoyée en réponse à certaines questions concernant l'œuvre poétique de Jack Kerouac, affirmait catégoriquement que Mexico City Blues lui avait appris presque tout sur la "poésie improvisée écrite", ajoutant que d'après lui, "Kerouac est le génie non reconnu de la poétique de la page littéraire aux Etats-Unis". Ce qui, alors, m'avait surpris, c'était la netteté tranchante avec laquelle Ginsberg situait ainsi l'œuvre poétique de Kerouac. Il s'agissait véritablement d'une réévaluation aussi nette que nécessaire. En effet, depuis la parution de On the Road, Kerouac a toujours et presque exclusivement été considéré comme un romancier. Même la publication de Mexico City Blues par Grove Press en 1959, ainsi que la parution de quelques autres plaquettes n'ont rien fait pour redresser la balance.

Mais maintenant, vingt-cinq ans après la mort de Kerouac, l'heure est venue de nous pencher de nouveau sur cette poésie folle, joyeuse, triste, magnifique, où, peut-être même plus que dans ses romans, nous nous trouvons en face d'un homme extrêmement complexe et doué d'une sensibilité suprême qui lui a permis de devenir un des interprètes les plus éloquents de la condition de homo americanus entre les années 1940 et 1960.»

Pierre Joris