Fiche technique
Format : Broché
Nb de pages : 607 pages
Poids : 920 g
Dimensions : 16cm X 24cm
ISBN : 978-2-343-19816-3
EAN : 9782343198163
Poésie en ruines
la pensée et la poétique de Yûnus Emre
Quatrième de couverture
Poésie en ruines
La langue turque est tard venue dans la littérature du Moyen-Orient et a dû faire sa place à côté des langues dominantes qu'étaient l'arabe et le persan. Elle s'impose d'un coup à travers la poésie de Yûnus Emre (1240-1320).
Tout de suite très populaire, elle a subi une distorsion significative en étant interprétée selon une orientation mystique et, en même temps, en se trouvant supplémentée d'une multitude de poèmes apocryphes signés de variantes du même nom. L'édition critique n'a paru qu'en 1997, alors que les éditions populaires en turc simplifié rassemblant pêle-mêle poèmes apocryphes et authentiques étaient largement diffusées.
Yûnus Emre, deux surnoms, est cet étrange poète dont le programme poétique s'offre à une trahison permanente, comme il l'annonce lui-même. Sa vie reste un mystère. Elle se réduit essentiellement à sa signature à la fin de ses poèmes et à la mention de son maître, aveugle et musicien qui divulguait un enseignement spirituel sans être affilié à une confrérie. Yûnus Emre représente, à ce titre, la tradition de l'islam anatolien, syncrétiste et hétérodoxe, dont la spiritualité, la pensée ironique et contestataire de toutes les institutions, à commencer par le soufisme, ne peut se déployer que poétiquement.
Ses poèmes mettent en oeuvre le désir naïf du lecteur pour la mystique, afin de le conduire à la ruine, à ce champ de ruines qu'est la spiritualité. Le goût de ses poèmes tient à la provocation à jouer avec soi-même, à jouer du double sens du poème, à juxtaposer le sens mystique qu'il déroule longuement pour mieux abuser son lecteur jusqu'au coup fatal des derniers vers - où surgit sa signature - qui ruinent le paisible et satisfaisant paysage mystique où le lecteur s'était assis. La duplicité y est l'essence du poème qui ouvre la spiritualité de l'amour, lequel s'affranchit ainsi de son héritage métaphysique.