Qui se souvient de sa vie ?

Au fil d'une plume fièvreuse, haletante, déchirante parfois, ces évocations d'un temps passé, sans chronologie véritable, comme une fiction qui aurait été vraie ou une réalité romanesque : la vie est un roman.

Qui peut se rappeler exactement un moment précis de son existence tel qu'il s'est vraiment déroulé ? Qui se souvient de sa vie ?

Daumal disait déjà : «Dire ce que je connais, ni plus ni moins. Ecrire est une véritable acrobatie...»

Une acrobatie sur le fil du rasoir, un balai entre les mains. Car il y a un côté liquidation dans ce livre, un côté «place nette que je puisse continuer ma vie». Désencombrée de ce fardeau d'images en dérives incontrôlées et l'esprit, désormais, plus léger, le pied plus sûr.

I leuri Miller avait été le premier lecteur de Qui se souvient de sa vie, première mouture. Et voici ce qu'il écrivait à Marie-Magdeleine Brumagne en 1962 : «Le livre semble avoir été écrit d'un seul jet, comme du sang jaillissant d'une blessure. Il est violent, tendre, poétique, toutes choses en une.» Gageons que les lecteurs qui le découvriront trente ans plus tard ne démentiront pas le sage de Big Sur. «Maintenant que vous avez ouvert les vannes - ajoutait Miller - (et vous êtes une sorte de Niagara, vous savez) qui sait ce qu'il adviendra ?»

Qui sait ?