Réformer la santé

Déficit chronique, inégalités d'accès aux soins, déserts médicaux, files d'attente auprès du spécialiste, notre système de santé est au bord de l'implosion. Le malaise est palpable dans les hôpitaux, chez les généralistes. Pourtant depuis 50 ans, lois et ordonnances, s'enchaînent à un rythme de plus en plus soutenu. De réforme en réforme nous nous reconduisons les problèmes, nous piétinons, notre frénésie législative témoigne plus d'un « immobilisme convulsif », comme le disait en son temps Alain Peyrefitte, que d'une véritable volonté de réformer.

Pourquoi, nous français, nous faisons du sur place, alors que nos voisins européens ont su évoluer. Nous sommes presque partout moins bons. Le coût financier, les inégalités d'accès aux soins, la qualité des soins. Notre pays dépense pour son système de santé 2,3 points de PIB de plus que la moyenne des pays de l'OCDE. Sur la grande scène médiatique, les discours vont bon train, économiques, politiques, syndicaux. Philosophiques plus rarement !

L'auteur nous invite à ressaisir le grand malaise qui traverse aujourd'hui notre système de santé à travers la pensée de Michel Foucault. C'est dans l'histoire que nous trouverons les clefs pour avancer, nous dit Foucault : « la réexploration que nous pouvons faire présente un certain intérêt : il s'agit de mieux connaître non pas la crise actuelle de la médecine, qui est un concept faux, mais le modèle de fonctionnement historique de cette discipline depuis le XVII^e siècle, pour savoir dans quelle mesure il est possible de le modifier. » Cette réexploration prend chez Foucault la forme d'une enquête généalogique. Réformer, c'est d'abord se poser les questions : qu'est-ce qu'un médecin, qu'est-ce qu'un hôpital, qu'est-ce qu'une consultation ? L'enquête généalogique nous permet de comprendre comment ces objets se sont constitués dans l'histoire. Et de prendre conscience que nos représentations du médecin, de l'hôpital, de la consultation, ne sont plus adaptées à l'ordre médical nouveau qui émerge aujourd'hui.

Inspiré par Michel Foucault, l'auteur soutient la thèse que vivons en réalité une transition épistémologique. Plus que nos voisins européens, nous restons prisonniers de la pensée clinique, qui a fait la gloire de la médecine française au XIX^e siècle. Nous avançons à reculons vers un nouvel ordre médical, une autre rationalité, d'autres pratiques, d'autres organisations. Et dans ce grand bouleversement, c'est peut-être aussi, un autre rapport de l'homme à sa santé dont il est question.