Un Gascon du 20e siècle

Comme le voyageur qui longtemps chemine et qui, parvenu au sommet d'une colline s'arrête et se retourne pour mesurer le chemin parcouru, Robert Castagnon a fini par poser un instant son bâton de pèlerin pour prendre la plume et rédiger un livre en forme de bilan sur la vie qu'il a connue dans son coin d'Armagnac et ailleurs aussi.

Page après page, on reste confondu par la variété, l'étendue et l'efficacité de toutes ses initiatives qui se bousculent, prennent corps, s'interpénètrent sans trêve dans tous les domaines de la vie publique, associative, sportive, militaire, politique, culturelle ou journalistique.

Non pas à la manière d'un touche-à-tout désireux de cumuler charges ou honneurs, mais bien plutôt à la façon d'un homme d'action qui n'a eu de cesse de vouloir faire ployer la dure réalité devant la pugnacité de ses convictions pour des causes qu'il a tenues pour justes et défendables. Et avec à l'évidence ce souci constant de ne déléguer que très peu, ce qui est le propre des esprits très exigeants.

«Notre vie vaut ce qu'elle nous a coûté d'efforts» si l'on en croit François Mauriac. Et Robert Castagnon a quelque raison d'être fier de la sienne, lui qui ne semble pas avoir été très économe ni de son temps, ni de son énergie, ni de sa force de persuasion pour mener à bien tout ce qui lui a tenu à coeur au fil des années: organiser et impulser le Sport Universitaire dans ses vertes années, créer ex-nihilo un authentique circuit automobile homologué, présider des clubs sportifs, pendant près d'un demi-siècle (!) pour la course landaise, plusieurs mandats pour l'Office du Tourisme Nogarolien, assurer l'édition d'une revue culturelle de qualité, assumer des fonctions et des responsabilités politiques, créer des entreprises...

Il n'est pour s'en convaincre que d'établir un début de liste de toutes les célébrités qu'il a côtoyées de près; citons pêle-mêle: H. Cochet, Maurice Trintignant, J.P. Beltoise, Philippe Bouvard, les Présidents Chirac, Mitterand et De Gaulle qui le chargea de mission, Patrick Baudry, Léon Zitrone, Nougaro (père et fils), les vedettes de la variété des années 70, et bien sûr tous les acteurs du monde Landais puisque c'est lui aussi qui a donné à la Course Landaise sa configuration actuelle.

Il avait bien raison le vieil Hugo: «Ceux qui vivent sont ceux qui luttent». Et Robert Castagnon qui a pas mal lutté a donc aussi beaucoup vécu, avec en fin de compte sans doute la satisfaction du devoir accompli avec rigueur, obstination, franchise et même panache. Comme un vrai Gascon qu'il est, comme Cyrano, à contre-courant parfois, seul le plus souvent, mais avec au fond de lui la certitude et la conviction de celui qui sait qu'il était bien dans le vrai.

Guy Lateulade