Un papillon sur la neige

En proposant ce nouveau recueil à l'attention de ses fidèles lecteurs, Daniel Ancelet se souvient avoir relevé dans l'excellente revue de poésie «Points et Contrepoints», aujourd'hui malheureusement disparue, dans le n^o74 de septembre 1965, cette phrase prophétique que François-René de Chateaubriand adressait «à un jeune poète» le 10 octobre 1836 et qui avait été reproduite en juin 1965 dans le catalogue de la librairie Charavay: «Respectez la langue et l'oreille, soignez l'harmonie, donnez-vous garde des exemples de la nouvelle école; ne croyez pas que jamais les horreurs que l'on étale actuellement sur la scène soient des sources de beautés... Et ne pensez pas qu'on renouvelle le style en retournant à la barbarie.»

Il croit fermement aux vertus revigorantes et roboratives de la poésie régulière, qu'elle épouse l'émotion ou qu'elle l'apaise, et rien ne l'émeut plus que de savoir que l'une de ses prières est lue, depuis des années, pendant des messes de funérailles.

Si vous l'interrogez sur ses choix, il vous lira ce qu'écrivait Baudelaire dans l'une de ses préfaces aux Fleurs du Mal: «Je me suis arrêté devant l'épouvantable inutilité d'expliquer quoi que ce soit à qui que ce soit.»

Si vous lui rappelez que Verlaine se gaussait de la rime «ce bijou d'un sou», il vous rétorquera que ce même Verlaine écrivait en 1894:

«Il est vrai que je reste dans ce nombre

Et dans la rime, un abus dont je sais

Combien il pèse et combien il encombre,

Mais indispensable à notre art français.»

Et si vous le poussez dans ses retranchements, il vous avouera que rien ne lui a fait plus plaisir que ce quatrain envoyé il y a une dizaine d'années par le délicieux poète Yves Bernard, enlevé trop tôt à l'affectueuse admiration de ses amis:

«Dans vos vers, Daniel Ancelet,

Honneur des «fantaisistes»

J'écoute l'écho qui persiste

De la voix de Toulet.»