Variations androgynes

[...] Tout le monde pense que c'est une reine qui tire le désert dans son dos.
Elle est à la hauteur de l'oasis et de la soif du chameau.
Elle est toute bleue. Son sang est bleu. Ses yeux intérieurs sont bleus.
À travers la dune des écritures, elle garde la beauté d'une aiguille de soleil.
Elle est grande comme son cœur.
Ses ancêtres ont bu du sable.
Ils ont creusé des puits.
Ils ont bu le sang des chameaux.
Son écriture est un oued à sec qu'elle racle pour exister.
Elle est une fille d'immigrée.
Elle est un million d'immigrés.
Elle est un milliard d'immigrés.
Elle écrit pour ne pas crier. Mais elle crie.
[...] Son corps est tatoué de larmes. Et pour cela, elle tatoue ses cahiers.
Elle ne lit que les livres qui sont des tatouages.
Elle vient de rien et commence à écrire ce rien.
Elle s'appelle Siham.

Serge Pey