Mathieu Leonard pour "L'ivresse des communards : Prophylaxie antialcoolique et discours de classe", éditiosn LUX
La légende noire d’une Commune grise semble avoir vécu. Or, en décembre 1871, l’Académie de médecine qualifiait l’insurrection de «monstrueux accès d’alcoolisme aigu». À la fin du XIXe siècle, on observe le discours réactionnaire se draper d’oripeaux scientistes amalgamant prolétariat, socialisme, maladie mentale et ivresse en une repoussante allégorie de la révolution. Cette étude part d’une minutieuse archéologie du mythe de l’ivrognerie des communards dans la littérature versaillaise et médicale. Elle décrit aussi comment l’hygiénisme s’investit d’une mission sanitaire contre le «fléau de l’alcool» dont il faut détourner les classes dangereuses afin de régénérer la nation.
Au cœur de cette vision du monde se diffuse l’obsession de la dégénérescence, qui prépare le terrain à l’eugénisme, et laissera, contre toute attente, ses scories jusque dans l’anarcho-individualisme et le néomalthusianisme.
Mathieu Léonard est l’auteur de L’émancipation des travailleurs. Une histoire de la Première Internationale (La fabrique, 2011) et a participé au mensuel CQFD. Il est aussi vigneron en vin naturel.